La brique dans la construction médiévale
Le moment de la réapparition de la brique dans l'architecture de Cahors
reste incertain. Son emploi se généralise alors que s'intensifie
le renouveau urbain amorcé dans les années 1100 mais il semble
que les plus anciennes maçonneries en brique, datées sur des
critères stylistiques, ne soient pas antérieures à la
seconde moitié du XIIe siècle. La brique devient dans les années
1200 le principal matériau de construction de la ville, et bien que
la pierre de taille reste le matériau des édifices prestigieux
comme l'église Saint-Urcisse, le pont Neuf ou le palais Duèze,
la brique n'est pas pour autant le matériau des seules constructions
moyennes : de grandes demeures, comme l'hôtel du N° 52 rue de Lastié
ou l'hôtel "de Vayrols", sont en brique.
Le succès de ce matériau a des causes multiples, parmi lesquelles
figure l'avantage d'une production plus rapide pouvant répondre à
la très forte croissance de la demande, et ce à un moindre coût
de production et de mise en oeuvre. La brique est en outre le matériau
modulaire par excellence, prêt à l'emploi et d'une manutention
aisée, qui ne requiert qu'une main-d'oeuvre peu spécialisée.
Le moulage permet la production en série de formes préfabriquées,
comme des arcs chanfreinés ou des placards munis d'une feuillure. Cependant,
dans nombre d'exemples, les briques montrent d'évidentes traces de
retaille. Nous ne pouvons pas dire si moulage et taille se sont succédé
dans le temps ou bien si les deux techniques ont été utilisées
à une même époque.
La mise en oeuvre
L'homogénéité des maçonneries en brique
montre que l'on a utilisé exclusivement des briques neuves et de très
bonne qualité. Elles sont posées panneresses ou boutisses (c'est-à-dire
qu'on voit en façade leur grand ou leur petit côté) comme
au hasard et on n'observe donc aucune correspondance des joints verticaux.
Les joints horizontaux sont à peu près aussi épais que
les briques elles-mêmes.
Cette mise en œuvre si soignée suffirait pour nous faire penser
que l'appareil en brique est fait pour rester apparent, ce que confirment
quelques exemples où des fausses-briques et des faux-joints peints
se superposent aux vrais appareils uniquement sur les encadrements des baies.
Les murs sont habituellement composés de deux parements de briques
neuves qui enferment une fourrure, c’est-à-dire un remplissage,
de fragments de briques en remploi ou de moellons pas forcément remployés.
Pour les murs les plus minces le remplissage est en simple mortier.
Les épaisseurs des murs en brique sont fort variables, allant de 55
à 75 cm et exceptionnellement jusqu'à 1,30 m pour les édifices
qui ont pu être étudiés. Elles varient en fonction de
l'emplacement du mur dans la maison, de son niveau ou des éventuels
équipements qu'il reçoit : placards,
conduits d'écoulement d'éviers
ou latrines,
cheminées.
La brique se prête à toutes les exigences de la construction.
Néanmoins, on utilise la pierre calcaire (dont la résistance
à la charge est plus grande) pour les éléments en porte-à-faux,
les supports libres, les seuils et appuis. Ainsi les piédroits
et les piliers des grands arcs des baies de boutique, qui supportent les charges
et sont exposés au passage, sont en pierre. Il en va de même
des chaînes d'angle (qui renforcent la liaison de deux murs perpendiculaires)
souvent bâties en pierre calcaire au niveau du rez-de-chaussée.
Les seules moulures en briques sont les colonnettes et les tores qui soulignent
les fenêtres d’une maison de la rue Delpech et du N°
42 rue de la Daurade [notice].
À Cahors, la brique moulée ne saurait remplacer le grès
de Figeac pour les moulures et le décor sculpté.
À l'inverse, la brique répond à des emplois spécifiques
dans les constructions en pierre. Elle est assez systématiquement utilisée
pour les arcs de placards
et les embrasures
de fenêtres des maisons en pierre. Les murs de refends (murs porteurs
établis à l'intérieur de la maison) ou ceux destinés
à être masqués par des structures secondaires sont également
en brique. L'élévation ouest de la tour du palais
de Via [notice]
en donne un exemple. La prestigieuse tour, dont les parements extérieurs
sont en grès de Figeac, montre pourtant une élévation
ouest en brique. Celle-ci était cachée par un corps de bâtiment,
aujourd'hui disparu, qui lui était accolé.
La brique disparaît presque totalement au XVe siècle, remplacée
par du moellon de tout venant mêlé de fragments de brique en
remploi. Lorsqu'à partir de la fin du XVIe siècle ou le début
du XVIIe, elle est de nouveau employée à Cahors, il s'agit d'une
brique tout à fait différente, plus fine, plus claire et plus
friable, moins bien cuite et désormais destinée à être
enduite.
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