Les équipements domestiques : éviers, latrines et cheminées
Parmi les progrès en matière de confort intérieur qui ont marqué les XIIIe et XIVe siècles, et qui se reflètent dans l'architecture de la maison, figurent les équipement concernant l'hygiène et le chauffage : des éviers, des latrines et des cheminées sont prévus dès la construction des bâtiments. Des textes médiévaux nous renseignent sur la réglementation prévoyant des systèmes d'évacuation des déchets et des eaux usées en milieu urbain, obligeant parfois à l'aménagement de fosses vidangeables et de conduits maçonnés encastrés dans les murs des maisons.
Les éviers
médiévaux sont généralement abrités dans
de grandes niches. Ces structures
simples présentent le plus souvent une dalle creuse formant une cuvette
dotée d'un système d'évacuation, encadrée parfois
par deux tablettes disposées un peu plus haut.
Quatre éviers nous sont parvenus à Cahors, dont celui de la
cuisine du N° 42 rue de la Daurade, qui semble être le seul à
avoir conservé ses dispositions d'origine. Il est logé dans
une niche couverte d'un arc
brisé et munie d'un petit jour. Les eaux usées s'écoulaient
par un conduit ménagé dans le mur jusqu'à une fosse située
dans la cour.
Les modes d'évacuation pouvaient cependant varier d'une maison à
une autre. Ainsi, il semble qu'au n° 88 rue des Soubirous, les eaux aient
été collectées dans un récipient placé
sous la cuvette. D'autres maisons n'avaient qu'un écoulement direct
dans une "andronne", c’est-à-dire dans une sorte de
ruelle très étroite entre deux maisons servant d’égout
à ciel ouvert.
Les latrines
font également partie des équipements qui se généralisent
dans la maison au XIIIe siècle. Leur composante essentielle est la
plaque de pierre trouée disposée sur un socle d'une trentaine
de centimètres de hauteur, au-dessus d'une structure d'évacuation.
Un jour percé dans le mur apportait air et lumière.
Les latrines les mieux conservées à Cahors sont, encore une
fois, celles du n° 42 rue de la Daurade. Elle sont aménagées
dans une galerie
accessible par une porte percée dans le mur sud de la cuisine située
au premier étage de la tour. Elles étaient aménagées
à l'intérieur d'un placard dont le vantail s'insérait
dans la feuillure visible autour de l'ouverture. Le placard ne pouvait donc
être fermé que lorsqu'on ne s'en servait pas, car l'exiguïté
de la structure empêchait l'utilisateur d'y rentrer. Au contraire, les
latrines du deuxième étage du corps de bâtiment sud du
palais Duèze étaient aménagées dans une étroite
pièce de 1, 40 m sur 4 m.
À chaque latrine correspondait un conduit maçonné ménagé
dans l'épaisseur du mur qui aboutissait dans une fosse d'aisance. Certains
bâtiments étaient probablement dotés d'un système
de chasse par récupération des eaux de toiture.
Les habitations les plus modestes étaient sûrement dépourvues
de latrines, comme le laisse penser un texte de 1296 où quelques "prud'hommes"
habitant la ruelle de Galaup, dans un des quartiers sud de la ville, se plaignirent
de leurs voisins qui jetaient "des ordures de corps d'homme et de femme"
dans un canal qui tombait dans le Lot. Leurs protestations outrées
nous indiquent en même temps que la plupart des maisons de Cahors devaient
être équipées de latrines. Dans la première moitié
du XIVe siècle, les demeures relativement opulentes en possédaient
probablement une par étage.
Le dernier des équipements domestiques de la maison est la cheminée.
On n’en retrouve que rarement dans les édifices antérieurs
au XIIIe siècle même si un exemplaire maçonné avec
hotte et conduit adossé au mur, daté des années 900-930,
a été identifié à Doué-la-Fontaine, petite
commune du Maine-et-Loire.
Aucune cheminée médiévale de Cahors ne nous est parvenue
complète, sauf au "cuvier du chapitre" où une série
de cinq cheminées sont exceptionnellement établies dans l'épaisseur
des murs.
La forme la plus habituelle était celle de la hotte en encorbellement,
avec un foyer et parfois un conduit qui fait saillie à l'extérieur.
Les matériaux et les formes restent incertains. Néanmoins, nous
savons que la hotte pouvait être portée par des consoles et des
colonnettes. Les profils des cheminées dont les arrachements sont avec
certitude ceux de la période médiévale (au N° 42
rue de la Daurade, au premier étage du N° 71 rue du Cheval-Blanc,
et la grande cheminée de l'aula du palais Duèze par exemple)
nous montrent tous des hottes pyramidales. Aucune hotte droite n'est à
ce jour datable des XIIIe ou XIVe siècles.
La forme des cheminées change peu au cours de ces deux siècles.
La seule évolution sensible est celle du décor sculpté
des chapiteaux.
Les conduits sont rectangulaires, engagés ou pris dans l'épaisseur
du mur. Au-dessus des toits, les cheminées sont couronnées par
de hautes souches
polygonales ou circulaires, en brique ou en pierre, dont quelques rares
exemples sont connus à Cahors, en particulier au palais
de Via,
[notice].
Il faudrait pouvoir quantifier les vestiges de cheminées médiévales
afin de pouvoir évaluer véritablement leur degré de généralisation
au début du XIVe siècle.